Interview Afshin DJoon Club Paris Dure Vie Virna Diane

Depuis plusieurs années, le Djoon vit de belles heures et bénéficie d’une identité forte dans le paysage nocturne parisien. Rencontre avec l’homme qui a su donner son âme et sa couleur au club considéré comme le plus soulful de la capitale. Afshin Assadian, mélomane à la double casquette DJ/Programmateur nous parle de ses débuts, de ses métiers et bien entendu de cet endroit atypique où se rencontrent les aficionados du groove.

Dure Vie •  Pour commencer, peux-tu te présenter en quelques mots et nous parler des missions qui t’incombent en tant que programmateur du Djoon ?

Afshin Je bosse dans la nuit depuis déjà quelques années, j’étais gérant de différents clubs pendant plusieurs années avant d’ouvrir mon premier restaurant en 2000, puis enfin le Djoon en 2003, et récemment le Trac en 2014.

Au Djoon, je dirais que ma mission en tant que programmateur est de garder notre identité tout en sachant la renouveler, et de savoir accueillir les légendes comme les nouveaux talents. Dans le désordre on a eu la chance de faire venir : Danny Krivit, les Martinez Brothers, Tony Humphries, Djeff Afrozila, Timmy Regisford, Black Coffee, Louie Vega, Osunlade, Kenny Dope, Boddhi Satva, Joe Claussel, Maya Jane Coles, Theo Parrish, Moomin, Levon Vincent, Ame, Seth Troxler, Floating Point, Karizma, Spinna… Avec les équipes qui m’ont épaulé au cours des années je pense qu’on a fait un bon travail et que nous avons su créer une identité forte et notre mission est de la défendre sur du long terme, comme a su le faire un établissement comme le Rex.

 

Dure Vie •  Comment définirais-tu la ligne artistique du lieu ?

Afshin Soulful, bien sûr. Mais soulful au sens large : une musique pleine d’âme, sans limite de genres.

 

Dure Vie •  Au niveau des actualités du Djoon, quelles sont les dates à retenir prochainement ?

Afshin Boddhi Satva fête le premier anniversaire de sa résidence Ancestral ce vendredi, ça promet d’être assez mouvementé ! Sinon, dans un futur très proche, il y a le retour de nos soirées Detroit Madness, qui mettent à l’honneur les artistes de la Motor City, ou encore Rick Wade, Rancido, avec qui on a joué à Amsterdam pour notre soirée The Djoon Experience à l’ADE, ou encore Shimza, qui à mon sens est le prochain surdoué sud africain qui va tous nous impressionner. Et quelques soirées surprises en dehors du Djoon qui devraient aussi surprendre.

 

Dure Vie •  Les soirées MyGrooves connaissent une belle renommée auprès d’un public grandissant. Comment décrirais-tu l’ambiance à une personne qui n’y est jamais venue ?

Afshin C’est une ambiance bon enfant, avec un public à l’esprit très ouvert, qui peut commencer sa soirée sur de la disco, passer par de l’afrobeat et finir sur un vieux morceau ska à 6 heures du matin. L’idée c’est de se laisser porter par le groove sans s’imposer de limites de genre.

 

Dure Vie •  Qui est le producteur ou Dj que tu es le plus fier d’avoir booké pour cette rentrée 2015 ?

Afshin C’est compliqué pour moi de donner un nom en particulier, là ou je suis fier de notre programmation, c’est qu’on a un bouquet d’artiste assez divers plutôt qu’une ou deux têtes d’affiche.

Si je devais de te sortir quelques noms, je te citerais Djeff (Afrozila), par exemple, qu’on a fait venir pour la première fois en France en 2012, et qui ramène un public toujours plus grand à chacun de ses passages au Djoon, public qui repart toujours avec des étoiles dans les yeux. Nous sommes aussi très fiers d’accueillir Piranhahead pour la première fois en France, c’est le petit protégé de Moodymann et une vraie force de la nature une fois derrière les platines, on a hâte de voir ça.

 

Dure Vie •  Quelles sont selon toi qualités d’un programmateur avisé ?

Afshin La curiosité avant tout, et une capacité à se laisser guider par son instinct plus que par la hype du moment. Le Djoon a toujours été un club soulful, on n’a jamais cherché à suivre les uns ou les autres, mais plutôt à booker les artistes que nous aimons. On bookait Joe Claussel, Theo Parrish ou Moodymann il y a déjà 8 ou 9 ans, à l’époque ou on avait pas la chance de les voir en France aussi souvent. On a aussi été les premiers à faire jouer les Martinez Brothers ou à donner une chance aux talents sud-africains comme Black Coffee, Culoe De Song ou Shimza en Europe par exemple. En tant que club underground, c’est aussi notre responsabilité d’aller dénicher les artistes et de leur donner une chance de se produire et d’exposer leur talent.

 

Dure Vie •  Tu mixes également, du coup peux-tu nous donner celles d’un DJ aguerri ?

Afshin Avoir une culture musicale très large et être ouvert d’esprit me paraît essentiel. Je n’ai jamais vraiment compris les DJ’s qui se revendiquent d’un seul genre et qui s’y limitent. A mon sens, un bon DJ emmène son public pour un voyage musical, comme un Theo Parrish ou un Djeff Afrozila par exemple, qui a une culture afro mais qui nous a récemment offert un set soulful d’une qualité étonnante. Il faut être imaginatif et avoir le goût du risque, mais tout en sachant lire son public pour pouvoir le surprendre avec le bon morceau au bon moment lui faire découvrir de nouvelles sonorités et le faire voyager.

 

Dure Vie •  À ce sujet, on voit dans tes productions des inspirations qui ressuscitent les grands noms de la soul. Tu peux nous parler de ce parti pris?

Afshin C’est plus un feeling du moment qu’un parti pris, j’ai toujours aimé la soul, mais on a aussi pu éditer des tracks d’Adriano Celentano ou Paul Simon. Sinon, dans un registre plus afro, on a aussi des remixes avec Black Motion pour mon ami Dean de Tribe Records, et quelques sorties à venir sur The Djoon Experience qui sont plus house que soul.

 

Dure Vie •  Le Djoon est un lieu qui se situe un peu en marge des clubs (restaurant/bar/dancefloor). Pourquoi ce choix d’un lieu hybride?

Afshin Quand je suis tombé sur cet espace, avec ces beaux volumes, son haut plafond, ses énormes baies vitrées, un espèce d’immense loft avec vue sur le métro aérien, je me croyais à New York et j’ai eu un coup de cœur dès le début. Son côté hybride était tout naturel, dans un quartier de bureaux avec un beau potentiel pour le midi. Pourquoi ne pas profiter de ça ? C’est toujours un challenge de jongler entre les deux activités, mais le restaurant me permet de prendre plus de risques sur le club.

 

Dure Vie •  Peux-tu nous parler des endroits (de France et de Navarre) qui t’ont inspiré pour sa création ou simplement ceux qui t’ont marqué dans ta vie de producteur/programmateur ?

Afshin Je ne pourrais pas citer un seul endroit, mais j’ai eu la chance de beaucoup voyager, donc que ce soit entre Brooklyn, Tokyo, au Brésil, à Londres ou à Hong Kong… Je m’inspire de quelques idées que j’ai pu voir dans des endroits qui m’ont plu à gauche à droite, plus que d’un endroit en particulier.

 

Dure Vie •  On dit souvent du public du Djoon qu’il est cosmopolite, peux tu nous dire en quoi ?

Afshin On a une clientèle à l’image de notre programmation : très diverse, que ce soit danseurs, music lovers, plus jeune ou un peu plus âgé, mais toujours avec le même bon esprit. Mais le plus important pour moi, c’est qu’il s’agit d’un public qui n’a pas peur d’être surpris et qui nous fait suffisamment confiance pour nous suivre même sur des artistes un peu moins connus, et ça, c’est aussi ce qui fait notre force.

 

Dure Vie •  Un top 4 des tracks qui symboliseraient le mieux le Djoon ?

 

by Virna Diane