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Pour la deuxième édition de cette chronique nous nous penchons sur le vinyle Beats de Los Muertos (Vol.1) produit par l’artiste américain Osunlade.

Le lien entre spiritualisme et musique n’est plus à démontrer.

Dans la plupart des religions la musique joue en effet un rôle important, notamment au cours des cérémonies, où elle a pour but de sublimer les prières et d’élever l’âme.

On a cependant moins tendance à associer ces deux notions lorsque l’on fait référence à la musique « moderne ».

Pourtant, s’agissant de Osunlade, ce rapprochement est nécessaire, car l’évolution musicale et professionnelle de cet artiste est intimement liée à sa vision spirituelle de la musique.

Osunlade est né dans l’Amérique profonde, à St Louis dans l’état du Mississipi. Il commence sa carrière en 1988 en travaillant sur plusieurs projets en lien avec le monde du cinéma, dont la série Sesame Street.

Très vite il va s’éloigner de ce monde qu’il juge trop superficiel pour lui permettre de s’épanouir en tant qu’artiste :

«  Osunlade felt the pressures and practices of the music business overshadowed his passion of music. He decided to no longer work under the influences of corporate ideals and demands. Choosing to find spiritual solace and to honor his soul »

Source : http://yorubarecords.net/

Cette démarche le conduit vers Ifà, le dieu Vaudou de la tribu Yoruba au Benin.

Cette remarque pourrait être anecdotique mais elle est nécessaire à la compréhension de la musique de l’artiste en général et plus spécifiquement du vinyle présenté ici.

Christian Warren, en plus d’être un producteur et DJ reconnu, est en effet un prêtre de la religion Yoruba.

Vous ne connaissez ni de près ni de loin cette religion ? Ne vous inquiétez pas, l’écoute du vinyle Beats de Los Muertos (Vol.1) sortie par Osunlade sur son label Yoruba Records en Mars 2000 fera office d’initiation.

En effet ce vinyle, truffé de références plus ou moins directes, est un réel petit guide de la religion Yoruba, qui donne son nom au label sur lequel il est sorti.

Par exemple le nom du vinyle, Beats de Los Muertos, évoque deux aspects importants de la culture Yoruba. D’abord, le culte des morts et la symbolique qui s’y rattache, sont des éléments centraux du culte vodou qui raffole des os, statuettes, et autres représentations morbides. Ensuite, le nom espagnol du vinyle souligne le métissage de cette religion qui est arrivée aux Etats Unis via les esclaves qui transitaient souvent par les Caraïbes. Et la culture hispanique de cette région, pourtant Chrétienne d’origine, est profondément marquée par la pratique vodou.

Le premier morceau « Cantos A Ochun Et Oya », est nommé d’après Ochun et Oya, des dieux yorubas : Ochun est la déesse de la fertilité et de la femme tandis, Oya la déesse du vent, des morts et des ancêtres.

Ce morceau est en fait une invocation en espagnol à ces déesses. Le mélange de maracas et de cymbales donne un certain gout sauvage à cette musique, tandis que le solo d’harmonica rappelle les origines américaines de l’artiste. La voix principale, celle d’une femme, semble celle d’une grande prêtresse. Elle est reprise par un cœur féminin donnant à l’ensemble un sentiment de joie collective quasi orgiaque, assez unique. C’est le morceau que l’on remarque le plus quand on écoute ce vinyle.

Sur cette même face on peut aussi écouter le son « Siguaraya ». Là aussi le titre est une référence à la religion Yoruba puisque la Siguaraya est une plante utilisée dans les concoctions pour entrer en transe. Le morceau est lui aussi au plus près du culte tribal, puisque il s’agit de plusieurs tam-tams frappés à rythme rapide, sans aucun ajout musical derrière. On s’attendrait plus à écouter ce genre de musique dans une exposition du Quai Branly que sur un vinyle de house américaine.

Le premier morceau de la face B, « Africa », rappelle les origines géographiques de cette culture. Il ressemble énormément au précédent (Siguaraya) : il semble être la version orientée club d’un même morceau, auquel on aurait simplement rajouté quelques effets et un beat. La composition relativement simple (pas de vocales, juste différentes sortes de percussions) rend le morceau un peu moins facile d’écoute, même s’il est néanmoins intéressant. Les percussions donnent de l’énergie au track, et le côté assez minimaliste de l’ensemble permet à notre esprit de dériver pendant que notre corps suit machinalement le rythme du morceau. Sûrement le but recherché par l’artiste.

Le dernier morceau de ce disque, « I dont’ Know » , contraste avec l’ensemble du vinyle. Il est en effet beaucoup plus proche de la deep-house américaine classique que de l’afro-house tribale à laquelle nous avait habitué Osunlade jusque là. A l’écoute, ce morceau évoque des labels comme Hot Creations plutôt que Yoruba Records. Cependant le morceau est agréable et la voix est celle de l’artiste lui même qui pour ce morceau s’est emparé du micro. De plus le timbre planant de Osunlade et les effets utilisés donnent un petit côté mystique au morceau, ce qui permet en réalité de l’inscrire assez bien dans la continuité de ce disque.

Ce vinyle très original a la mérite de faire découvrir des sonorités auxquelles on n’est pas forcément habitué en tant qu’écouteur lambda de musique moderne. L’artiste réussit cependant, notamment sur la track A1 (« Cantos a Ochun y Oya ») a créer un son parfaitement adapté au club à partir d’une identité musicale radicalement différente de celle du monde de la nuit. Ce morceau est vraiment réussi et devrait en convaincre plus d’un. Les trois autres morceau sont quand à eux plus difficiles d’écoute, même si le morceau « I don’t Know » a de quoi plaire à un public plus habitué à la musique plus communément entendue en club. Pour ma part, j’aurais tendance à préférer les deux morceaux de percussions tribales (Siguaraya et Africa) même s’ils sont « moins potables ». Dans tous les cas, ce vinyle est riche musicalement et possède le mérite de changer de ce que l’on entend quotidiennement.

Pour ceux et celles convaincus par ce vinyle ou pour les amoureux de longue date de l’artiste, vous aurez l’occasion d’écouter Osunlade et l’ensemble de l’équipe Yoruba Records le 10 Novembre au Djoon.

Facebook Event : https://www.facebook.com/events/174779369522446/

Article écrit par SMF

Lien pour les Vinyle sur Discogs et Beatport :

► Discogs : http://www.discogs.com/Osunlade-Beats-De-Los-Muertos-Vol-1/release/15826

► Beatport : https://pro.beatport.com/release/beats-de-los-muertos/239950